Introduction : Un débat qui n’a pas lieu d’être
L’intelligence artificielle (IA) est au cœur des débats, notamment en ce qui concerne son impact sur l’emploi. De nombreux articles de presse et publications en ligne soulignent les risques associés à l’automatisation croissante.
Par exemple, une étude de Goldman Sachs estime que plus de 300 millions d’emplois pourraient être affectés par l’IA [1], avec deux tiers des postes susceptibles d’être automatisés. Certaines entreprises annoncent d’ailleurs vouloir réduire leurs effectifs grâce aux systèmes d’IA.
Cependant, il est important de garder un pas de recul face à ces affirmations. Les journalistes, dans leur recherche d’audience, sont souvent enclins à produire des articles au ton anxiogène. Les titres alarmistes attirent davantage l’attention, mais ils ne reflètent pas toujours la réalité dans toute sa complexité.
L’IA n’est qu’un outil au service des entreprises. Si l’on se base sur ce que les entreprises et les États ont montré jusqu’ici il est logique de penser que leurs dirigeants ne vont pas hésiter longtemps avant d’utiliser l’IA pour réduire les coûts et augmenter les profits.
Regardons cela en détail :
Les dirigeants d’entreprise doivent faire face à la pression des actionnaires et à la concurrence. Si l’introduction de l’IA réduit les charges, notamment salariales, ils ne vont pas hésiter longtemps. Cela s’est déjà vu par le passé avec la délocalisation et l’automatisation industrielle.
Du côté des états, il y a un double discours. On parle de régulation, de formation et de transition, que de beaux discours…sans suite. Ce que l’on constate c’est que peu de pays investissent massivement dans l’un de ces trois domaines (j’ai écrit « peu », mais en fait, je n’en connais aucun).
Et pourtant, il ne serait difficile de prendre des mesures pour que la transition se passe en douceur et aux bénéfices de tous :
🌱 1. Partager les gains de productivité
- Réduire le temps de travail pour tous (par exemple, 4 jours/semaine) tout en maintenant les salaires.
- Augmenter les salaires des travailleurs et financer la protection sociale grâce aux gains apportés par l’IA.
- Mettre en place une taxe sur les robots / l’automatisation pour financer la transition et former les personnes touchées.
📚 2. Former massivement
- Investir dans la formation continue pour permettre des reconversions vers des métiers émergents (ou moins facilement automatisables).
- Enseigner très tôt à l’école des compétences complémentaires à l’IA : créativité, pensée critique, relationnel, éthique.
- Aider à développer des métiers où l’humain restera indispensable : soin, éducation, culture, écologie, pour ne citer que ceux-là.
🏛 3. Réguler et planifier
- Limiter la vitesse à laquelle certaines IA sont déployées dans des secteurs sensibles.
- Encourager les entreprises à co-construire les plans de transition avec leurs employés
- Soutenir des modèles coopératifs et publics d’utilisation de l’IA, plutôt que de laisser tout le pouvoir aux grandes entreprises privées.
🔭 4. Repenser la finalité du travail
Plus fondamentalement : si on peut produire plus avec moins d’heures travaillées grâce à l’IA, ne serait-il pas temps de repenser le travail comme une activité choisie, utile et épanouissante, plutôt qu’une contrainte de survie ? Cela suppose peut-être d’aller vers un revenu universel ou d’autres formes de redistribution des richesses.
Ces points sont-ils utopiques ? Malheureusement oui, et je le regrette.
Il est indéniable que entreprises et les états vont utiliser l’IA et cela va engendrer des pertes d’emploi. Cela a déjà commencé. Cela dit, essayons de regarder ce qu’il est arrivé dans le passé avec les grandes transitions.
Les leçons de l’histoire
L’histoire nous montre que chaque révolution technologique a entraîné des transformations majeures sur le marché du travail. Certaines professions ont disparu, d’autres ont émergé, et le bilan final a souvent été plus complexe qu’il n’y paraissait à première vue.
Les petites révolutions technologiques
- L’arrivée des pelles mécaniques : Avant leur introduction, les travaux d’excavation étaient réalisés manuellement, à la pelle et à la pioche, nécessitant une main-d’œuvre importante. Si cela a réduit le besoin en travailleurs pour ces tâches spécifiques, cela a aussi accéléré les projets de construction et d’infrastructure.
- La machine à laver remplaçant les lavandières : Autrefois, le lavage du linge était une tâche manuelle, longue et pénible, qui se faisait à la rivière. L’arrivée de la machine à laver a supprimé ce métier mais a libéré du temps pour d’autres activités et a amélioré la qualité de vie.
- L’automatisation des centrales téléphoniques : Dans les années 1920, l’industrie du téléphone employait plus de 300 000 opératrices. L’automatisation a supprimé ces emplois, mais elle a aussi conduit à la naissance de nouveaux métiers dans les télécommunications.
Les grandes révolutions
- La révolution industrielle (fin du XVIIIe – début du XIXe siècle) : L’introduction des machines à vapeur et des procédés de fabrication mécanisés a bouleversé des industries entières. À court terme, certaines professions ont été affectées, mais à long terme, cela a généré de nombreux nouveaux emplois et stimulé l’économie.
- La révolution numérique (fin du XXe – début du XXIe siècle) : L’informatique et Internet ont transformé le monde du travail. Si de nombreux métiers traditionnels ont disparu, la révolution numérique a aussi créé d’innombrables opportunités dans le développement de logiciels, le commerce en ligne et bien d’autres domaines.
Ce que les faits démontrent
L’histoire nous apprend que chaque transformation technologique entraîne des perturbations. Oui, des emplois disparaissent, mais d’autres se créent en parallèle. Si les transitions peuvent être difficiles pour certains travailleurs, à long terme, l’innovation favorise la croissance et la diversification des métiers.
Les craintes liées à l’IA ne sont donc pas nouvelles : elles sont comparables à celles qu’on a pu voir lors des révolutions industrielles et numériques. Ce qui importe, ce n’est pas tant de redouter l’IA, mais plutôt de comprendre comment s’y adapter.
Les compétences clés pour rester attractif sur le marché de l’emploi
- Des compétences en utilisation des outils numériques liés à l’IA (analyse de données, programmation et autres…).
- Une compréhension des systèmes d’IA et de leurs limites pour les utiliser efficacement en entreprise.
Les entreprises recherchent activement des profils formés aux technologies d’IA. Se former dès maintenant est donc un avantage concurrentiel indéniable.
Formation continue et apprentissage tout au long de la vie
Nous avons pour habitude d’apprendre un métier et de faire carrière dans ce métier. Je pense qu’il faut voir cela autrement. Oui, il faut apprendre un métier, mais pas seulement. Il faut également acquérir de nouvelles compétences adaptées aux demandes des entreprises.
Adaptation des systèmes éducatifs
Les systèmes éducatifs doivent intégrer l’apprentissage des compétences numériques et de l’IA dès le plus jeune âge. Il est également important de développer les compétences transversales telles que la créativité, la pensée critique et la résolution de problèmes.
Conclusion – Les IA sont-elles un risque pour l’emploi ?
Les IA en elles-mêmes ne sont pas un risque pour l’emploi, ce ne sont que des logiciels. C’est la façon dont les entreprises et les gouvernements les utiliseront qui est un risque pour l’emploi.
Et quand on connaît le fonctionnement des entreprises et des gouvernements j’avoue que je suis quelque peu inquiet sur le futur du marché de l’emploi.
L’IA représente un tournant majeur dans l’histoire du travail. Comme toute révolution technologique, elle apporte des défis, mais aussi des opportunités. C’est votre capacité d’adaptation qui déterminera si vous en tirerez profit.
Le verre à moitié vide ou à moitié plein ? L’IA n’est pas une fatalité, mais une opportunité de repenser notre rapport au travail. L’IA représente un défi majeur pour le monde du travail, mais aussi une formidable opportunité de progrès. C’est à nous de faire les choix qui permettront de construire un avenir où l’IA sera au service de l’humain et du bien commun.
Merci de m’avoir lu, j’espère que cet article vous permettra de mieux comprendre les tenants et aboutissants de l’effet de l’IA sur les emplois.
Sources :
[1] Generative AI could raise global GDP by 7% | Goldman Sachs